PROGRAMME DE COURTS-MÉTRAGES
LA BOÎTE À MALICE – 38 MIN., de Koji YAMAMURA
– Les plus petit·es aussi ont droit à leur séance d’animation japonaise ! Dans cette série, réunie par Les Films du Préau, 5 courts-métrages poétiques et avant-gardistes sont présentés pour une durée totale de 38 minutes. Le format idéal pour les 2 ans et plus et pour les premières sorties au cinéma ! Koji Yamamura met en scène le quotidien avec beauté pour le plus grand bonheur des tout petit·es et des plus grand·es.
– Une maison
JAP – 1993 – Sans dialogue – 4 mn
En survolant un paysage enneigé, Karo l’oiseau bleu et Piyobuputo l’oiseau rose, découvrent un vieil arbre. Ils vont construire leur maison sur l’une de ses branches.
– Les sandwiches
JAP – 1993 – Sans dialogue – 4 mn 20
Confortablement installés dans leur nouvelle maison, Karo et Piyobuputo préparent des sandwiches pour un pique nique. Une préparation très festive…
– Imagination
JAP – 1993 – Sans dialogue – 4 mn 20
Il pleut averse. Karo rentre vite à la maison et raconte à Piyobuputo qu’il a croisé un poisson volant… Ce dernier éclate de rire et entraîne à son tour son ami dans un monde imaginaire.
– Kipling Junior
JAP – 1995 – VO – 15 mn
Kipling Junior vit avec ses parents dans une petite maison à la campagne. Il a pour amis une bande d’insectes musiciens et décide de les accompagner en ville pour un concert. Est-ce vraiment une bonne idée ?
– Quel est ton choix ?
JAP – 1999 – VO – 10 mn
Raoul l’alligator a mal aux dents, mais il a également besoin d’une coupe de cheveux. Il hésite : ira-t-il chez le coiffeur ou chez le dentiste ?
PONYO SUR LA FALAISE, de Hayao MIYAZAKI
(JAP – 2009 – VF – 1h42)
– Alors qu’il joue sur la plage, le petit Sosuke découvre une petite fille poisson rouge nommée Ponyo, piégée dans un pot de confiture. Sosuke la sauve et décide de la garder avec lui. Le petit garçon lui promet de la protéger et de s’occuper d’elle, mais le père de Ponyo, Fujimoto la force à revenir avec lui dans les profondeurs.
On porte un regard naïf sur un sujet complexe : celui, cher à Miyazaki, d’une confrontation entre le monde des Hommes et le monde naturel. Le réalisateur, habitué des fables écologiques, propose ici une lecture plus simplifiée qu’à son habitude : il souhaite s’adresser à des enfants et proposer une histoire dans laquelle les petit·es tiennent les premiers rôles. Simplifiée mais pas simpliste ! On est loin du monde manichéen occupé par des gentil·les et des méchant·es.
Ponyo, c’est une créature mi-enfant mi-poisson au caractère bien trempé, dotée d’un coeur pur et ayant parfois des agissements aux conséquences bien lourdes… Sosuke, c’est cet enfant solitaire mais pas farouche qui aime d’un amour tendre celles et ceux qui l’entourent. Il fait partie du monde humain qui a plutôt tendance à occuper et abimer les profondeurs aquatiques.
De leur rencontre s’en suit un voyage initiatique qui permettra à nos personnages de grandir sans jamais perdre la bonté qui les caractérise. Simple, touchante et naïve jusque dans ses traits de crayons, cette histoire vous entraînera au plus profond de l’océan dans un conte qui parvient à saisir l’absolue beauté de l’enfance. (M.F.)
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LE SERPENT BLANC, de Taiji YABUSHITA
(JAP – 1958 – VF – 1h20)
– Dans la Chine ancienne, un enfant achète au marché un petit serpent blanc. Mais ses parents n’en veulent pas. Il doit donc se résigner, la mort dans l’âme, à le relâcher. Quelques années plus tard, l’enfant est devenu un jeune homme, tandis que le reptile refait son apparition sous la forme d’une princesse…
Une pierre fondatrice… Le Serpent blanc est le tout premier long-métrage d’animation de la Tôei Dôga, fondée en 1956, qui aspire à devenir le « Disney de l’Orient ». Avant de s’attaquer aux classiques de la littérature jeunesse occidentale, le studio s’inspire de légendes chinoises : du Serpent blanc (1958) à la série Dragon Ball (1986-1989). Maintes fois porté à l’écran, le conte oppose une femme-serpent, amoureuse d’un simple mortel, à un moine qui pourfend les esprits. Objet de plusieurs adaptations en Chine, il met en scène une figure féminine plus ou moins ambivalente, amoureuse transie ou amante maléfique. Fourmillant de merveilles, la version animée de la Tôei met l’accent sur l’amour indéfectible du couple, par-delà ses différences. (N.B.)
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INDIA SONG, de Marguerite DURAS
(FR – 1975 – 2h00)
avec Delphine Seyrig, Claude Mann, Michael Lonsdale, Mathieu Carrière…
– Dans son plus beau film, avec des moyens dérisoires, Duras évoque une histoire d’amour impossible dans l’Inde des années 1930, dissociant image et voix off sur la musique de Carlos d’Alessio.
Imaginé suite à la création d’une pièce radiophonique, India Song est un cri d’amour désespéré, un film sensoriel, musical, et ne respectant aucune trame narrative classique. Conçu en seulement 73 plans et en ayant uniquement recours à la voix off (parce que Duras n’y connaissait rien en mixage), India Song retranscrit la moiteur de Calcutta à Boulogne-Billancourt, tout racontant le trou noir qu’est le désir. Mais India Song est aussi une chanson, une mélodie de Carlos D’Alessio immortalisée par Jeanne Moreau et qui est, pour paraphraser Michael Lonsdale, vice-consul de Lahore, « un air qui donne envie d’aimer, alors que l’on a jamais aimé. » (G.G.)
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HIGH SCHOOL, de Frederick WISEMAN
(US – 1968 – VOST – 1h15)
– 1968. Dans un grand lycée public de Philadelphie, les cours de langue, de cuisine, de mathématiques et de sport rythment le quotidien des élèves. Au fil de rencontres entre enseignants, étudiants, parents et responsables administratifs, l’idéologie et les valeurs sociales de l’École se révèlent.
Dans High School, on explore, on s’étonne, on sourit et on grince des dents ! La caméra, souvent en gros plans, observe impitoyablement les corps en rythme ou les expressions des élèves, hésitant·es ou bien décidé·es, face à celles des parents ou de l’autorité scolaire. En cours, des mots émergent : « Obéir, être un homme, mort de [Martin Luther] ‘King’, inégalités, système matriarcal, femelle passive, blessé, mines… » Les séquences s’enchaînent et constituent lentement la carte mentale qui s’exerce sur ces jeunes esprits aux prises avec une guerre et pris dans une grande vague de mouvements contestataires. (N.M.)
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LES PETITES MARGUERITES, de Věra CHYTILOVÁ
(CZ – 1966 – VOST – 1h17)
avec Jitka Cerhová, Ivana Karbanová…
– Un poème punk féministe, débridé et loufoque, aussi psychédélique et pop que subversif et audacieux. Un film majeur des sixties !
Dans les cieux de l’Histoire du cinéma, cette œuvre – fondamentale, séditieuse, à jamais nécessaire – est un feu d’artifice. De ces feux qui nous illuminent sans jamais s’éteindre. Voilà une véritable destruction créatrice : patriarches de tous les pays, sachez qu’une marguerite est une fleur corrosive, qui explose les cadres et remonte le réel dans un tourbillon de couleurs, de sons, et d’affronts jouissifs. Et retenons une leçon : puisque le monde est si mauvais, il faut être aussi mauvais que lui. (R.S.)
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PEAU D’ÂNE, de Jacques DEMY
(FR – 1970 – 1h29)
avec Catherine Deneuve, Delphine Seyrig, Jacques Perrin, Jean Marais…
– Delphine Seyrig est l’exquise fée des Lilas volant au secours de la princesse sa filleule : le rayonnement de Deneuve, la musique de Legrand et la mise en scène de Demy font de ce conte cruel un enchantement.
La situation mérite attention. Plus de 50 ans après sa sortie, Peau d’Âne reste un chef-d’œuvre absolu, drôle et méchant, subversif, kitsch et nageant en pleine vague flower power. Un cake d’amour, une robe couleur du temps, un perroquet et un hélicoptère dans la forêt de Chambord, une rose qui parle et une sorcière qui crache des crapauds… Franchement, que demande le peuple ! Le film se termine d’ailleurs par les vers du conte original de Charles Perrault : « Le conte de Peau d’Âne est difficile à croire, mais tant que dans le monde on aura des enfants, des mères et des mères grands, on en gardera la mémoire. » (G.G.)
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UNE HISTOIRE D’EAU, de Jean-Luc GODARD et François TRUFFAUT
(FR – 1958 – 0h12)
avec Jean-Claude Brialy, Caroline Dim, Jean-Luc Godard…
– Un couple veut rejoindre Paris. Il y a des inondations. Ils rencontrent quantité de difficultés qui sont prétextes à divertissement.
Ce film, tourné par Truffaut et monté par Godard est un petit bijou : un maître-étalon de la Nouvelle Vague qui présage À Bout de Souffle. L’histoire est bête comme chou : une étudiante, coincée par les inondations, tente de rejoindre Paris, elle est prise en stop par un jeune homme qui la séduit. Le génie se situe ailleurs : dans le montage frénétique, les faux-raccords, le son qui cavale, les images d’un road trip charmeur entrecoupé par celles de d’eau et ce texte, logorrhéique et sublimement écrit, dit à la fois par Caroline Dim et Jean-Luc Godard. (C.B.)
VIVRE SA VIE, de Jean-Luc GODARD
(FR – 1962 – 1h23)
avec Anna Karina, Sady Rebbot, André S. Labarthe, Guylaine Schlumberger, Brice Parain…
– Godard filme un poème d’amour à Anna Karina en même temps qu’un constat social sur la déchéance d’une jeune femme, avec références à la Loulou de Pabst et à la Jeanne d’Arc de Dreyer.
Désormais Godard comme Karina sont deux figures tutélaires qui nous manquent et à qui l’on s’adresse en regardant des images depuis l’outre-monde des vivants. On a trop peu démontré que les œuvres godardiennes étaient celles de couple au travail (bien après Anna il y aura Miéville, et avant Miéville il y aura eu Gorin). Au fond, Vivre sa Vie est un essai d’impression du sublime sur pellicule : du fameux champ-contrechamp avec Renée Falconetti au Portrait ovale d’Edgar Poe, « après tout, tout est beau. » (R.S.)
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ASPIRATIONAL, de Matthew FROST
(US – 2017 – VOST – 0h03)
avec Kirsten Dunst, Lauren Robertson, Maria Blasucci…
– Kirsten Dunst est abordée par deux fans, plus intéressées par des selfies, des partages et des likes que par un vrai échange avec la star…
Associer un court-métrage à un long-métrage aussi disert, révoltant et admirable que Sois Belle et tais-toi ! n’est pas chose aisée. Nous avions d’abord pensé au court-métrage récompensé Maria Schneider, 1983, une de ses interviews rejouées par plusieurs femmes. La redondance de la forme interview nous aura dissuadé·es. Quand soudain, Aspirational, tout petit film de Matthew Frost, est réapparu : si le propos du film de Delphine Seyrig est toujours d’une sidérante actualité, transposer ce Sois Belle et tais-toi ! à la culture de l’image contemporaine fait émerger un nouveau discours : et si notre regard de spectateur·rices conditionnait le regard qu’on nous offre au cinéma ? Et si nous nous interrogions avec plus de force encore sur la condition de comédienne ? (C.B.)
SOIS BELLE ET TAIS-TOI !, de Delphine SEYRIG
(FR – 1976 – 1h52)
avec Jane Fonda, Maria Schneider, Shirley MacLaine, Ellen Burstyn…
– Delphine Seyrig interroge une vingtaine d’actrices sur leur métier et les stéréotypes qu’on leur a imposés, dont Maria Schneider, Juliet Berto, Jane Fonda et la percutante Ellen Burstyn.
Déjà sorti en salles en 2023, déjà passé sur Arte, déjà vu peut-être, et vous pensez que ça suffit ? Sérieusement ? Sois Belle et tais-toi ! devrait être programmé dès le collège et être revu régulièrement, comme les leçons de secourisme. Histoire que ça ne s’évapore pas complètement à l’approche du premier blockbuster qui passe. Ce film est rare et surprenant. Plus que l’on imagine. Plus que la bande-annonce ne le laisse présager.
Chaque homme de plus de 35 ans qui viendra au Cosmos pour cette séance, se verra offrir un cadeau… (A.B.)
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L’AMOUR FOU, de Jacques RIVETTE
(FR – 1968 – 2h13)
avec Bulle Ogier, Josée Destoop, Jean-Pierre Kalfon, Dennis Berry…
– Le film-fleuve mythique de Rivette dissèque la désagrégation d’un couple pendant les répétitions d’Andromaque de Racine, à l’aide d’une caméra pseudo-documentaire et d’un couple inoubliable : Bulle Ogier et Jean-Pierre Kalfon.
Serge Daney disait (au sujet de la sortie de La Bande des Quatre en 1989) : « Ce qui est beau dans ce film, dans sa durée, c’est qu’on n’est jamais totalement pris et en même temps on ne peut pas ne pas avoir envie de voir la séquence d’après. » Oui L’Amour fou marche comme ça aussi. Il nous met sur une chaise dans la salle de spectacle où se déroulent les répétitions, nous émeut, nous perd. Mais on attend la suite, porté par la vérité des longues improvisations et l’alternance de scènes qui se jouent entre l’art et la vie, deux natures d’image, des regards, des émotions qui se croisent. Claire (Bulle Ogier) dérive, aime, dérive, … s’enregistre, les mots d’Hermione mêlés à ceux de son désespoir. André S. Labarthe interroge les comédiens, micro tendu, voix basse : « Les gens de théâtre n’accordent que peu d’importance à leur vie? » Sébastien lui aussi aime, doute et cherche un rythme nouveau à la langue de Racine, celui de la parole pour « faire que les gens se parlent ». Plasticité du théâtre, plasticité de l’amour et de la création dans la société de 1968 qui aime, se déchire et invente.
Ce film presque introuvable, a été restauré cette année en version intégrale, c’est un événement, un film rare ! (N.M.)
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JEANNE DIELMAN, 23, QUAI DU COMMERCE, 1080 BRUXELLES, de Chantal AKERMAN
(BEL + FR – 1975 – 3h14)
avec Delphine Seyrig, Jan Decorte…
– Ce film-phare de la modernité, montrant l’aliénation d’une ménagère qui se prostitue pour subvenir à ses besoins, détaille en lancinants plans-séquences un quotidien qui s’apprête à dérailler.
Je me demande comment les spectateur·rices de 1975 ont réagi à ce film ? Au cinéma, à l’époque, on oscille entre femme transie d’amour, femme préparant le dîner en attendant le retour de l’homme repu de sa journée à faire tomber le fric sur le foyer ou à la tromper. Femme maman ou putain la plupart du temps assignée à résidence ou à l’homme. Jeanne est seule. Elle a une adresse. Elle répète les mêmes gestes. L’espace domestique est ritualisé, filmé presque chirurgicalement. À l’intérieur : le tout pour le tout pour s’en sortir. Voilà ce que peut être la vraie vie des femmes. Voilà aussi ce qui peut se passer quand la coupe est pleine et c’est pas joli-joli. J’imagine le choc à la hauteur du mien. Il paraîtrait même que c’est le meilleur film de tous les temps et je n’ai rien pour affirmer le contraire. (C.B.)
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