Le Labo Média, c’est l’outil du Cosmos pour parler des films à l’affiche et de cinéma en général. En discussion ? Le documentaire de Johan Grimonprez, Soundtrack to a Coup d’état avec Cheikh Sakho.
Nous avons profité de la venue de Cheikh Sakho, docteur en histoire contemporaine, pour discuter de l’importance des pages souvent méconnues de l’histoire au coeur du documentaire Soundtrack to a Coup d’Etat de Johan Grimonprez. Ce récit parfois très surprenant est nourri par des images d’archives édifiantes mises à la lumière des études postcoloniales. Pour découvrir le film, il reste encore quelques dates au Cosmos !
Le synopsis du film :
Jazz, politique et décolonisation s’entremêlent dans ce récit d’un épisode méconnu de la guerre froide. En 1961, la chanteuse Abbey Lincoln et le batteur Max Roach, militants des droits civiques et figures du jazz, interrompent une session du Conseil de sécurité de l’ONU pour protester contre l’assassinat de Patrice Lumumba, Premier ministre du Congo nouvellement indépendant. L’ONU devient alors l’arène d’un bras de fer géopolitique majeur et Louis Armstrong, nommé “Ambassadeur du Jazz », est envoyé en mission au Congo par les États-Unis, pour détourner l’attention du coup d’État soutenu par la CIA.
L’avis du GNCR :
Le projet est dingue : comment raconter une histoire de la décolonisation en la croisant avec des légendes du jazz américain tout en se réappropriant ses codes. De fait, c’est exactement ce qu’annonce le titre du film : travailler à une bande originale qui accompagne les mouvements d’émancipation et, plus particulièrement, le destin tragique de Patrice Lumumba.
Et, outre son univers graphique qui emprunte son élégance aux riches heures du label Blue Note, la structure du film ressemble beaucoup à un air de bebop. Il suffit de regarder sa définition exacte : « style de jazz (…] qui se caractérise par des tempos rapides où l’improvisation est basée plus sur une structure harmonique sophistiquée que sur la mélodie. La section rythmique est éclatée et fait usage d’harmonies chromatiques et dissonantes. »
Voilà exactement comment se déploie le film, pour aboutir à un ensemble qui nous permet d’entrevoir de manière très limpide les enjeux de la guerre froide appliqués au continent africain. Dans un monde parfait, le film devrait être montré à tous les élèves qui étudient l’histoire contemporaine au lycée.
– Séverine Rocaboy, Cinéma Les Toiles, Saint-Gratien