Drôle de Félix, d’Olivier DUCASTEL et Jacques MARTINEAU
(FR – 2000 – 1h35)
Avec Sami Bouajila, Patachou, Ariane Ascaride…
_ Pour faire la rencontre de son père qu’il ne connaît pas, un jeune Dieppois se rend à Marseille. Il choisit l’auto-stop comme moyen de transport et n’hésite pas à emprunter des chemins de traverse…
Sous la forme d’un road movie ensoleillé, le duo Ducastel-Martineau, pour son deuxième film, raconte un moment important de l’histoire du sida : les lendemains de l’arrivée des trithérapies qui, à partir de 1996, ont permis aux malades du sida de « vivre avec » le virus et de s’imaginer à nouveau un avenir. Le film dresse dès lors le portrait d’un jeune séropositif plein d’entrain cherchant à renouer avec son père. Mais au fil des étapes de son voyage, c’est une famille choisie qu’il se constitue, plus bienveillante et importante que sa famille biologique… (D.R.B)
Jeanne et le Garçon formidable, d’Olivier DUCASTEL et Jacques MARTINEAU
(FR – 1998 – 1h34)
Avec Virginie Ledoyen, Mathieu Demy, Valérie Bonneton…
_ Jeanne, réceptionniste dans une agence de voyage, collectionne les amants. Un jour, elle tombe sur Olivier dans le métro et c’est le coup de foudre. Mais leur amour se retrouve assombri par le grand mal de la décennie : le sida.
C’est sous la forme d’une comédie musicale pop et pimpante que se présente le premier film d’Olivier Ducastel et Jacques Martineau, sans doute les seuls réalisateurs dont l’oeuvre tout entière est traversée par le sida et ses évolutions, des années terribles de l’épidémie (Nés en 68) jusqu’aux traitements les plus contemporains (Théo et Hugo dans le même Bateau). Dans Jeanne…, les deux admirateurs d’un cinéma de Jacques Demy dont on trouve nombre d’échos (la forme musicale, mais aussi le rôle principal tenu par Mathieu Demy), racontent un moment singulier de l’épidémie : celui où l’apparition de nouveaux traitements (les trithérapies) ouvre enfin l’horizon pour les malades, mais sans régler illico tous les problèmes. Il y a encore des morts et des deuils. Et la mobilisation — comme le montre la présence forte d’Act Up et de ses militants à l’écran — est toujours indispensable pour alerter, dénoncer, mobiliser. Film joyeux et tragique, sombre et coloré, Jeanne… est une oeuvre majeure de la filmographie du sida. (D.R.B.)
Toute la Beauté et le Sang versé, de Nan GOLDIN
(US – 2023 – VOST – 2h07)
_ Immense artiste (dont des photographies sont présentées au MAMCS dans le cadre de l’exposition Aux temps du sida), Nan Goldin est aussi une activiste infatigable, qui, depuis des années, se bat contre la famille Sackler, responsable de la crise des opiacés aux États Unis et dans le monde.
Ça commence par la voix feutrée de Nan Goldin. Comme un renard qui avance dans l a neige. Son calme surprend, tant ce qu’elle déroule est terrible. Hypnotisé·es, on la suit. On s’enfonce toujours plus profondément. La douceur de sa voix, la beauté des images d’archives, l’absence de complaisance, l’intelligence, tout engage à la suivre. Trois histoires s’entremêlent. Le présent : le combat et l’engagement actuel de Nan Goldin, ses actions avec le collectif P.A.I.N. contre la famille Sackler. Le récit de sa vie et de celles de ses proches, depuis les années 50 jusqu’à aujourd’hui. Son travail artistique de photographe. Les trois sont indissociables, passionnantes, bouleversantes. Elles s’enrichissent, donnent du sens et de la profondeur les unes aux autres, forment un parcours intime et politique qu’on ne soupçonnait pas. On se surprend à changer son regard sur une oeuvre mal vue et mal lue. On change aussi son regard sur les êtres. On voit la douceur, la beauté, la force de rébellion et de résistance toujours intactes. (A.B.)
Les Témoins, d’André Téchiné
(FR – 2007 – 1h52)
Avec Satya Dusaugey, Michel Blanc, Emmanuelle Béart…
_ Paris. Été 1984. Manu arrive à Paris et s’installe avec sa soeur. Il y fait la connaissance d’Adrien qui lui fera découvrir son milieu, son style de vie et des amie·s. Au milieu : une passion amoureuse et l’irruption du sida.
À l’instar de François Truffaut, André Téchiné a toujours souhaité réconcilier le film d’auteur et le cinéma mainstream. Comme à son habitude, il s’entoure pour Les Témoins d’un casting cinq étoiles (Emmanuelle Béart, Michel Blanc, Julie Depardieu…) pour réaliser cette fois-ci un film historique et mémoriel sur le sida, « surtout parce qu’il n’y en a pas eu beaucoup, en France du moins ». Démarrant son récit à l’été 1984, au moment où la maladie commence à prendre la forme d’une funeste pandémie, Les Témoins est avant tout une métaphore pudique sur la fragilité de la vie. (G.G.)
Tongues Untied, de Marlon RIGGS
(US – 1989 – VOST – 55 min.)
_ Marlon Riggs réunit ses frères, parmi lesquels le poète Essex Hemphill, dans ce pamphlet sensible autour de l’expérience des hommes noirs homosexuels au moment de l’épidémie de sida.
Slam, danse, musique, récit en prose, journal… tout se mêle dans ce poème expérimental et intime par lequel Marlon Riggs s’emploie à faire surgir les absents du cinéma américain mainstream — les noirs, les homosexuels, les séropositifs —, et à dénoncer les discriminations auxquelles lui et ses amis se heurtent au quotidien. Emblématique du new queer cinéma, ce documentaire intense est une des rares réalisations d’un cinéaste mort des suites du sida à 37 ans, en 1994. (D.R.B.)
Là où chantent les Écrevisses, d’Olivia NEWMAN
(US – 2022 – VOST – 2h05)
Kya, une petite fille abandonnée, a grandi seule dans les dangereux marécages de Caroline du Nord. Pendant des années, les rumeurs les plus folles ont couru sur la « Fille des Marais » de Barkley Cove, isolant encore davantage la sensible et résiliente Kya de la communauté. Sa rencontre avec deux jeunes hommes de la ville lui ouvre un monde nouveau et effrayant…
Plaire, Aimer et Courir Vite, de Christophe HONORÉ
(FR – 2018 – 2h12)
Avec Vincent Lacoste, Pierre Deladonchamps, Denis Podalydès…
_ 1990. Arthur a vingt ans et il est étudiant à Rennes. Sa vie bascule le jour où il rencontre Jacques, un écrivain qui habite à Paris avec son jeune fils. Le temps d’un été, Arthur et Jacques vont se plaire et s’aimer. Mais cet amour, Jacques sait qu’il faut le vivre vite.
Une dernière romance impossible, la mort qui rôde. Le cinéma est une histoire de spectres, mais ici ils ont une double résonance. Ils entourent les personnages du film, mais aussi les films de Christophe Honoré. Ce sont ses aînés en cinéma et en littérature. Emportés par « les saignées du sida, ils nous ont rendu inachevé et flottant », dira-t-il. Mais c’est sans doute encore leur présence qui rend ce film sensible et sensuel, et ses personnages fragiles et beaux, brisant la couche des couleurs, des décors, de la mise en scène ou des dialogues, parfois artificiels ou maniérés. Ces spectres les aideront à rire de la mort et à la devancer, et si ce n’est pas eux, c’est sans doute un peu la bande-son ! (N.M.)
L’Ami américain, de Wim WENDERS
(RFA + FR – 1977 – VOST – 2h06)
Avec L’Ami américain, inspiré par deux romans de Patricia Highsmith, Wim Wenders transplante dans la ville hanséatique de Hambourg l’imaginaire du film noir américain et se livre à une formidable relecture réflexive du genre, n’ayant rien à envier à ses plus beaux fleurons. Hanté par la morbidité, imbibé du climat humide de son décor portuaire, illuminé par des clairsobscurs glauques et des demi-jours douteux, L’Ami américain investit la division des deux Allemagnes comme l’écran paranoïaque où s’engouffrent les ombres mouvantes d’une cinéphilie constituée. C’est pourquoi l’on retrouve, dans des rôles de gangsters, des « pères » en cinéma tels que Nicholas Ray ou Samuel Fuller, mais aussi des cinéastes-amis comme Jean Eustache ou Daniel Schmid.
Et Maintenant ?, de Joaquim PINTO
(POR + ESP – 2014 – VOST – 2h44)
_ Et maintenant ? est un journal filmé, une réflexion sur la survie au-delà de tous les pronostics mais aussi sur l’amour, l’amitié, le cinéma et le Portugal depuis la révolution jusqu’à la crise actuelle.
Joaquim Pinto, figure du cinéma portugais, vit avec le VIH depuis près de vingt ans. Et maintenant ? est le carnet filmé d’une année sous l’emprise d’un traitement expérimental qui lui abîme le corps et l’esprit. Mais l’enquête sur soi dépasse rapidement le malade pour s’inscrire dans une réflexion éclectique sur le temps, la souffrance, sur les mystères de l’art et de la nature. Un va-et-vient émouvant entre les souvenirs et le présent, tout le présent : la politique, la sécheresse, une guêpe qui agonise au bord de la fenêtre… Un chant d’amour à la vie lorsque se profile l’ombre de la mort. (J.-F.P.)